Ce film souffre de nombreux défauts. Le principal est sans doute la médiocrité générale de l’interprétation. La palme à Scarlett Johansson qui semble victime d’une désincarnation plus profonde à chaque nouveau film (Lucy, Avengers, Under the skin, Her) au point de s’interroger : ses choix cinématographiques sont-ils aujourd’hui artistiques ou révélateurs d’une pathologie sur la relation qu’elle entretient avec son apparence et en particulier avec son corps (voir à ce sujet la critique Libé de J. Gester) ? Elle ne joue pas un rôle mais une paralysie générale : moue figée exaspérante ; mobilité d’un corps curieusement disgracieuse. C’est bien un robot, une coquille (shell), mais sans aucune trace humaine même fantomatique (ghost). Le film dès lors rate totalement son plongeon censément philosophique (dualité corps/âme) pour laisser de maigres sillons sur une surface glacée que jamais il ne rompra. Juliette Binoche ou Michael Pitt font dignement tout ce qu’ils peuvent pour transpirer d’humanité face aux robots qui les entourent sans jamais vraiment trouver l’équilibre entre excès et tâtonnements. Takeshi Kitano fidèle à son jeu robotique n’arrange rien à la congélation de l’ensemble… Seul Pilou Asbæk vibre d’humanité de son seul regard que le scénario gâchera dans un choix masochiste incompréhensible. Par ailleurs, le spectacle reste en deçà du déjà vu tandis que les décors peinent à sortir de l’abstraction laide et surchargée. Reconnaissons qu’une coquille, une seule, n’est pas vide : celle de l’escargot obèse auquel la mise en scène a été attelée. Le cinéphile assoiffé d’action meurt déshydraté et l’esthète est outragé. Enfin, la litanie « ce n’est pas tes souvenirs mais tes actes qui te définissent » finit par embarrasser le philosophe le plus profane ou vaguement existentialiste. Laid, superficiel et ennuyeux, voilà un film ni mortel, surtout pas immortel mais tout simplement mort. Vive le cinéma !